Londres
2019

1-Comment décririez-vous votre travail à des personnes qui ne le connaissent pas?

Mon travail s’inspire toujours du corps. Un corps charnel humain ou animal que j’allonge sur une toile et dont je prends le contour. À chaque posture, j’imagine l’apparence que je souhaite en donner. Mais, Je quête surtout un instant de vie, une attitude et donne corps à une pulsion. La figuration m’intéresse moins que le rapt d’énergie et d’instants partagés.
C’est à partir de ce dessin au fusain que je raconte une histoire en ne touchant plus la toile. Tout se passe à l’horizontal je commence à peindre en dripping. Un dripping maitrisé car il remplace mon pinceau ; c’est par le mouvement de mon corps que je peins le corps de l’autre.
Un corps prosaïque, matériel, le transformer en abstraction…
Avoir cerner le visible offre la possibilité de s’en abstraire. Très vite la figuration s’absente pour laisser place à une histoire.
Je peux travailler avec une seule couleur et la peinture devient presque dessin. Ou Parfois, le dessin se perd dans une fusion de couleurs. 

2- Qu’est-ce qui vous a inspiré à faire carrière dans l’art?

Je n’ai jamais pensé faire carrière dans l’art car , Être artiste n’est pour moi pas un métier mais c’est une vie . Je n’ai pas réfléchi à mon avenir lorsque j’avais 20 ans, il me paraissait juste évident et urgent que je sois artiste.
J’ai vécu en Provence, en liberté dans la nature, et c’est là que j’ai commencé à explorer l’espace en pratiquant tous les sports outdoor. J’étais fascinée par le pouvoir du corps dans sa dimension physique, esthétique, erotique. 

3- Qui ont été vos plus grandes inspirations?

Les autres ! « Autrui pièce maîtresse de mon univers » écrivait Michel Tournier lorsque il parle de Robinson Crusoé. C’est une phrase que je fais mienne. 

4-Quels artistes admirez vous le plus ? 

É́videmment Le Caravage dans l’extrême intelligence de ses compositions assorties des clairs obscurs qui révèlent les corps ; mais aussi Delacroix qui peint comme il dessine et sait faire vibrer les lumières et les âmes. 

Et pour finir Niki de St Phalle, femme et artiste des corps, qui vivait entièrement son œuvre et a su créer un univers puissant et onirique autant que Paula Rego qui me fascine aujourd’hui. 

5- Quelles sont les œuvres que vous préférez dans votre production?

Il y a deux œuvres qui ont été importantes pour moi : tout d’abord, « le grand chaperon rouge » que j’ai réalisé à New York lors d’une performance.
Le jour du vernissage d’un solo show, j’ai demandé à une personne du public de venir s’installer sur la toile et de prendre la position du petit chaperon rouge telle qu’elle l’imaginait dans le comte de Perrault et j’ai pris son contour. Puis j’ai fait la même chose en couchant le dog français de mon galeriste sur cette toile pour signifier la présence du loup et à̀ partir de cela, j’ai peint en dripping . Ce moment avait une intensité incroyable ce qui s’est ressentit dans l’œuvre ensuite. La deuxième a été celle de l’autruche que j’ai réalisé au Jardin des Plantes à Paris. Imaginez un animal de 130 kg avec un énorme corps des pattes préhistoriques à écailles, un long cou et une tête qui tient dans une main. Couchée sur ma toile j’en ai pris le contour et j’ai ensuite réalisé cette œuvre en dripping avec seulement du noir en essayant de traduire ce que j’avais ressenti : légèreté, douceur (des plumes) et puissance. 

6- Que préparez vous pour l’année 2019?

Tout d’abord une belle exposition que nous préparons à la galerie Afternyne en février prochain puis une présentation à Paris des peintures et des vidéos des grands animaux du Jardin des plantes, sur lesquels je travaille depuis 4 ans ; sans oublier une présentation de sculptures en bronze que je présenterai pour la 1ère fois en mars 2019 à Paris.